mercredi 30 janvier 2008

«When Bad People rise to the Top»

« Mais comment donc ce type-là s'est-il pris pour monter si haut? » (Précisons-le tout de suite, le genre masculin est utilisé uniquement afin d'alléger le texte, les femmes ne sont pas exclues du propos). Qui d'entre nous n'a pas entendu au moins une fois dans son milieu de travail, ce genre de réflexion formulé par des collègues et d'autres? Bien souvent heureusement, ce ne sont que des propos désabusés, formulés dans un contexte de frustration qu'on oublie aussitôt. Mais quand ce genre de réflexions se répète, se transmet et dépasse le stade de rumeurs, le problème est sérieux car c'est la crédibilité de toute l'organisation qui en est affectée. Régulièrement, chez nos voisins, les rédacteurs et les chroniqueurs de la presse d'affaires publient les noms des chefs d'entreprise, de présidents et de directeurs généraux, dans les secteurs publics comme privés, dont les performances douteuses ont contribué au déclin et aux difficultés de leurs organisations. Si ces révélations sont fort utiles professionnellement, elles contribuent cependant à entretenir le cynisme du public vis à vis de ceux qui administrent les biens collectifs.

Dans un article récent intitulé «When Bad People rise to the Top»* son auteur Terry Leap, que les recherches et les études dans la scène des crimes économiques ont permis d'examiner la carrière et le cheminement des acteurs principaux des scandales financiers des dernières décennies, brosse un portrait sans complaisance du profil psychologique de ces personnages contestés. Non seulement de ceux qui ont contribué à la descente aux enfers de leur organisation mais aussi de ceux qui ont, disons, tout simplement «mal performé».

Quand les mauvaises personnes sont au sommet... N'attendez vous pas à des réalisations mais plutôt à des «activités», par contre, beaucoup de promesses mais peu de faits, beaucoup de discours mais peu d'actions, beaucoup d'idées mais peu de substance. Bons mystificateurs, ces gens-là font beaucoup de vent, ils mettent la table mais quand il est temps de servir, ils vont défiler. Leur style de gestion? Ils soignent leur image et tiennent mordicus à faire savoir qu'ils mènent la barque car le «power trip» est leur marque de commerce. Portés à exiger la loyauté à leur «personne»... qu'ils confondent avec celle de l'organisation, leur intérêt passe avant l'intérêt public comme le démontrent les salaires généreux qu'ils s'octroient. Pour détecter ce genre de personnes, Terry Lead recommande un examen des caractéristiques de leur parcours et une analyse en profondeur de la teneur de leurs réalisations. Sont-elles durables? Comment ont été leur impact sur l'organisation? le temps est ici le meilleur critère pour juger si ces réalisations ont fait long feu ou non. Regardez leur entourage, les gens qu'ils ont nommés aux positions influentes et vous aurez une idée de leur sens de l'éthique. Ils sont du genre à tourner les coins rond ou «ils sont capables de vous faire de beaux sourires en vous assènant un coup de couteau dans le dos», avec en prime, si on peut dire, une propension à capter l'air du temps et en guise de «vision», un sens aigü de l'opportunisme. Et ils très forts aussi, ajoutons-le, en matière de compétences transversales.

Why Bad People rise to the top?

Comment alors ces gens-là ont-ils réussi à accéder à la barre des entreprises et surtout comment ont-ils réussi à donner le change pendant de longues années? Par quelle astuce ont-ils su déjouer la sagacité des membres des conseils d'administration, des comités de sélection qui les ont nommés à ces postes? Qui doit porter la responsabilité d'avoir mis ces mauvaises personnes au sommet? Envers qui sont-il imputables? En fait, l'article pourrait s'intituler aussi «Why Bad People rise to the Top?»

Terry Lead suggère une série de considérations à tenir en compte avant toute embauche de personnes ayant à assumer un rôle de leadership. D'une personne qui doit exercer la gestion et la direction d'une organisation où des dizaines sinon des centaines et plus d'employés , d'un cadre supérieur, les critères de sélection doivent être plus raffinées et la personnalité de l'individu doit être tenue en compte. Il faut vérifier les antécédents de la personne et son cheminement de carrière, surtout faire examiner par des pairs le contenu de ses réalisations ou la teneur de ses entreprises et son style de gestion. La notion de loyauté est importante mais il faut aussi éviter ceux qui sont portés à s'abonner au «sugarcoating». Examiner ses publications, ses écrits professionnels est une entreprise à ne pas manquer. Selon le type d'organisation, public, privé, d'enseignement ou de recherche, la personne doit démontrer non seulement des capacités de direction et d'organisation mais aussi des qualités de meneur par son envergure intellectuelle et son intégrité professionnelle. Cette personne pourra-t-elle s'adapter à une culture organisationnelle différente de celle dans laquelle elle a travaillé ? Dans un monde où tout évolue très vite, le style de gestion d'hier ne convient souvent plus aujourd'hui. Les modes de pratiques changent, même dans le même type d'oganisation, et les mentalités aussi, sans parler de la clientèle surtout quand on est dans un milieu d'enseignement et de recherche. Enfin Leap rappelle à tous ceux qui ont à sélectionner les candidats aux postes de dirigeants d'avoir en tête ce dicton comme quoi «le passé n'est pas (toujours) garant de l'avenir»

Terry Leap est professeur de gestion à Clemson University. Il est l'auteur, entre autres, des ouvrages suivants: Dishonest Dollars : The dynamics of White -Collar Crime, Collective bargaining and labor relations

*Disponible en ligne, voir à Ressources électroniques puis Périodiques électroniques

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